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L’agriculture française face aux défis de sa transformation.

La Rédaction

Cette semaine se tient le 56e salon de l’agriculture à Paris. À l’heure de l’agribashing, du développement durable et des questionnements sur la future Politique Agricole Commune (PAC), le monde agricole attend des réponses du pouvoir politique.

Le président de la République a effectué sa traditionnelle visite du salon, le moment pour lui d’annoncer sa vision pour l’agriculture, alors qu’elle rencontre bien des difficultés. Emmanuel Macron a voulu tenir un discours positif, tourné vers l’avenir. Il estime que les problèmes du monde rural seront abordés par le grand débat, il s’est donc centré, à la veille des échéances électorales, sur les évolutions à apporter à la politique agricole européenne.

L’Élysée explique : « Le président va lancer un appel à la mobilisation pour la PAC  et pour une unité européenne. Face aux grandes puissances comme la Russie, la Chine et les États-Unis qui font de leur agriculture un enjeu stratégique, les Européens doivent parvenir à être partenaires et non concurrents. ».

La PAC est depuis sa création en 1962 la pierre angulaire de la politique européenne pour son indépendance alimentaire et sa capacité a exporté des produits agricoles. Renouvelée tous les 7 ans, la dernière arrive à échéance en 2020 et une nouvelle doit être votée pour la période 2021-2027. Elle va subir d’importantes transformations par rapport à l’actuelle politique. Une première depuis sa création, son budget devrait diminuer de 5 %. Cela est dû en partie au départ du Royaume-Uni, mais aussi aux nouvelles priorités budgétaires des États membres.  Ils devront réaliser des plans stratégiques pour leur agriculture nationale, plans qui seront validés et suivis par la Commission européenne. L’idée sous-jacente est d’être au plus près des besoins locaux des agriculteurs en prenant compte de grandes disparités au sein de l’Union.

La nouvelle PAC va devoir aussi répondre à plusieurs questions contradictoires. La nécessité d’un prix juste pour les agriculteurs et les consommateurs, le respect des engagements climatiques internationaux et de développement durable sans diminuer la compétitivité et la productivité.

L’agriculture française est ainsi à la croisée des chemins. En 2018, les agriculteurs représentaient 3 % de la population active française et la moyenne d’âge était de 51 ans. Un tiers gagne moins de 350 euros par mois sans aide de la PAC et 20 % des exploitations enregistrent un déficit comptable. C’est une population vieillissante qui a du mal à moderniser ses outils de production. Il existe également un écart de plus en plus important entre les urbains et les agriculteurs, écart qui engendre un manque de compréhension entre les deux populations « La déconnexion de plus en plus grande en Occident avec la terre, les bêtes et l’acte de production, mais aussi avec la nature et la mort » explique Fanny Métrat, éleveuse de brebis en Ardèche.

Le schéma classique entretenu depuis presque 60 ans d’une ferme familiale de taille moyenne n’est plus tenable économiquement à l’heure de la mondialisation. La relève existe, elle est peu nombreuse, mais pleine d’idées. Une jeunesse qui pense pouvoir réinventer le métier d’agriculteur. Elle s’appuie sur l’arrivée de nouvelles technologies qui permettent un gain de temps et d’argent (traitement spécifique, automatisation, etc.), sur une meilleure valorisation de la production grâce à des circuits courts et l’élimination d’un maximum d’intermédiaires pour retrouver de la marge.
 
Ainsi, si l’agriculture est engagée vers son futur le défi est de taille, elle reste néanmoins partagée entre le volontarisme et une forme de réserve. La prochaine PAC va se révéler déterminante pour la transformation des schémas hérités de l’après-guerre.

Telle la reine rouge d’Alice au pays des merveilles, l’agriculture française a le besoin impératif d’évoluer, au prix si elle échoue de se faire distancer ?