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La civilisation du poisson rouge de Bruno Patino (Grasset) : un essai passionnant sur l’addiction digitale

Eric Delbecque

Le siège de Google, Mountain View, ne fait plus rêver : il inquiète. Le patron de Facebook n’inspire plus, il angoisse les lecteurs de La Boétie... Les rêves de Tim Berners-Lee, le « créateur » du Web, ont bien pâli, et les libertaires californiens qui s’imaginaient en héritiers de Teilhard de Chardin et bâtisseurs de la noosphère, se réveillent en 2020 en auxiliaires des cyberdémagogues les plus variés.

« Tel le poisson rouge, nous pensons découvrir un univers à chaque moment, sans nous rendre compte de l’infernale répétition dans laquelle nous enferment les interfaces numériques auxquelles nous avons confié notre ressource la plus précieuse : notre temps ». Aucun déterminisme technologique dans l’actuel modèle de servitude numérique volontaire, écrit Bruno Patino dans La civilisation du poisson rouge. Petit traité sur le marché de l’attention (Grasset), mais une simple mutation du capitalisme, un projet juteux : donner naissance à l’économie de l’attention, productrice de l’accélération générale. « Après avoir réduit l’espace, il s’agit d’étendre le temps tout en le comprimant, et de créer un instantané infini. L’accélération a remplacé l’habitude par l’attention, et la satisfaction par l’addiction. »
 
Le directeur éditorial d’Arte retrace une espérance brisée : celle d’un Internet qui nous rendrait meilleurs nous permettrait de partager le savoir et d’avancer sur la route du Progrès. Le cyberespace muta finalement en techno-capitalisme qui fait commerce du temps de cerveau disponible, de l’attention. Une puissante addiction : voilà ce qui nous menace à travers nos multiples écrans, smartphone en tête.
 
Le techno-capitalisme né du choc numérique se nourrit du temps : c’est sa ressource vitale. Le consommateur doit pouvoir faire plusieurs choses en même temps pour que notre modèle économique fonctionne. La production exige une accélération de la consommation, laquelle ne peut intervenir que si l’on réduit le temps nécessaire à certaines actions autrefois plus friandes de durée.
 
Ce n’est plus le producteur qui doit augmenter sa productivité, mais le consommateur. Parallèlement, les géants de l’Internet utilisent sciemment l’intelligence artificielle pour capturer le temps de leurs utilisateurs afin de le vendre aux publicitaires et aux autres entreprises. Quant aux données récoltées (toutes ces informations sur nos comportements, notre identité et nos habitudes de vie), elles permettent d’analyser, de prévoir et d’influencer les comportements pour nous rendre dépendants de plateformes numériques et de services.

« Tel le poisson rouge, nous pensons découvrir un univers à chaque moment, sans nous rendre compte de l’infernale répétition dans laquelle nous enferment les interfaces numériques auxquelles nous avons confié notre ressource la plus précieuse : notre temps ». Aucun déterminisme technologique dans l’actuel modèle de servitude numérique volontaire, écrit Bruno Patino dans La civilisation du poisson rouge. Petit traité sur le marché de l’attention (Grasset), mais une simple mutation du capitalisme, un projet juteux : donner naissance à l’économie de l’attention, productrice de l’accélération générale. « Après avoir réduit l’espace, il s’agit d’étendre le temps tout en le comprimant, et de créer un instantané infini. L’accélération a remplacé l’habitude par l’attention, et la satisfaction par l’addiction. »
 
Le directeur éditorial d’Arte retrace une espérance brisée : celle d’un Internet qui nous rendrait meilleurs nous permettrait de partager le savoir et d’avancer sur la route du Progrès. Le cyberespace muta finalement en techno-capitalisme qui fait commerce du temps de cerveau disponible, de l’attention. Une puissante addiction : voilà ce qui nous menace à travers nos multiples écrans, smartphone en tête.
 
Le techno-capitalisme né du choc numérique se nourrit du temps : c’est sa ressource vitale. Le consommateur doit pouvoir faire plusieurs choses en même temps pour que notre modèle économique fonctionne. La production exige une accélération de la consommation, laquelle ne peut intervenir que si l’on réduit le temps nécessaire à certaines actions autrefois plus friandes de durée.
 
Ce n’est plus le producteur qui doit augmenter sa productivité, mais le consommateur. Parallèlement, les géants de l’Internet utilisent sciemment l’intelligence artificielle pour capturer le temps de leurs utilisateurs afin de le vendre aux publicitaires et aux autres entreprises. Quant aux données récoltées (toutes ces informations sur nos comportements, notre identité et nos habitudes de vie), elles permettent d’analyser, de prévoir et d’influencer les comportements pour nous rendre dépendants de plateformes numériques et de services.

La civilisation du poisson rouge de Bruno Patino (Grasset) : un essai passionnant sur l’addiction digitale
L’emportement collectif né des passions individuelles et le pouvoir économique né de l’accumulation, écrit l’auteur, se combinent pour nous priver de notre ambition d’améliorer le monde par le digital. Un petit essai qu’il faut absolument lire pour se convaincre de la nécessité de se débrancher de temps en temps…

Eric Delbecque
Expert en sécurité intérieure, auteur des Ingouvernables (Grasset)